Convention de délimitation entre la France et la Sardaigne, conclue à Turin le 7 mars 1861

suite au traité du 24 mars 1860

Les anciennes bornes frontières dans les Alpes-Maritimes

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Art. 1. Du côté de la Savoie
Art. 2. Du côté de l'arrondissement de Nice

    " Sa majesté l'Empereur des Français (Napoléon III) et Sa majesté le Roi de Sardaigne (Victor-Emmanuel II), voulant, en exécution du traité conclu entre eux le 24 mars 1860, prendre d'un commun accord les dispositions nécessaires pour que les limites indiquées en termes généraux comme séparant désormais l'Empire français des Etats royaux soient fixées d'une manière précise, détaillée et définitive, ainsi que dans l'esprit le plus conforme aux intérêts des sujets des deux Souverains, ont chargé des officiers d'état-major de leurs armées de procéder, en qualité de commissaires nommés à cet effet, à l'opération du tracé de la ligne de démarcation sur le terrain et sur les plans géographiques, de même qu'à l'étude locale et à la désignation préliminaire des rectifications, échanges et arrangements spéciaux à stipuler, soit pour favoriser des deux côtés les propriétaires frontaliers dans des vues communes d'équité ; ces commissaires s'étant acquittés de leur mission conformémént aux instructions qu'ils avaient reçues, leurs dites Majestés ont résolu de conclure, d'après les bases ci-dessus, énoncées, une convention de délimitation entre leurs Etats respectifs, et Elles ont, dans ce but, constitué des plénipotentiaires savoir :

    Sa Majesté l'Empereur des Français, M. le comte Aloys de Rayneval, chevalier de l'ordre impérial de la Légion d'honneur etc., chargé des affaires de France à Turin ;

    Et Sa Majesté le Roi de Sardaigne, M. Dominique Carutti de Cantogno, commandeur de l'ordre royal des Saints-Maurice-et-Lazare, chevalier de l'ordre du Mérite civil de Savoie, etc., membre de l'Académie des sciences, etc., secrétaire général du ministére des affaires étrangéres de Sardaigne ;

    Lesquels, après s'être réciproquement communiqué leurs pleins pouvoirs, trouvés en bonne et due forme, sont convenus des articles suivants :

Art. 1. Du côté de la Savoie, la nouvelle frontière suivra la limite actuelle entre le Duché de Savoie et le Piémont, sauf les modifications ci-après :

    Au petit Saint-Bernard, le tracé sera déterminé de la manière suivante :

    Depuis le bec des Rolses ou Lancebranlette, qui fait partie de la crête des Alpes, il atteindra en ligne droite la source du torrent des Lanches et le suivra jusqu'au dessous et à l'ouest de l'hospice, en laissant le petit lac du côté du Piémont. Une borne sera placée au point où l'ancienne limite rencontrait ce torrent.

    A l'est, la ligne de démarcation sera l'ancienne limite entre les communes de Scez et de la Thuille jusqu'à 110 mètres avant sa rencontre avec la route du Col (borne). Là, elle fera un angle droit, rejoindra le ruisseau qui coule à l'est et près de l'hospice, et suivra ce ruisseau jusqu'à son intersection avec la ligne élevée perpendiculairement au chemin qui conduit de l'oratoire à l'hospice, à cent mètres de ce dernier établissement. Cette même perpendiculaire, par sa rencontre avec le torrent des Lanches, terminera de ce côté la limite entre les deux Etats. Une borne sera placée à l'intersection du chemin de l'oratoire avec la perpendiculaire, Annexe n° 3 (a).

    Au col du grand Mont-Cenis, la frontière sera tracée suvant la ligne de partage des eaux. L'auberge de la Ramasse marque un point de cette ligne en restant du côté de la France. Une borne sera placée à l'angle sud-est de cette maison. A droite et à gauche de la route, des bornes seront élévées, indiquant visiblement la frontière, jusqu'au sommet des montagnes qui dominent le col, et qu'on appelle Loulioun à l'est et la Ture à l'ouest. Ces bornes seront au nombre de quatre à l'est et de deux à l'ouest et placées comme l'indique le croquis ci-annexé sous le n° 4 (b).

    Au col du petit Mont-Cenis, la ligne de partage des eaux sera aussi la ligne de démarcation entre les deux Etats. Le hameau de Coulour, habité seulement l'été, est situé sur le col même. Au centre des quatre maisons qui le composent se trouve tout près et à l'ouest du chemin un petit mamelon dont le sommet est un point de la ligne de séparation des eaux (borne). A droite et à gauche, la ligne de démarcation remonte jusqu'au sommet des montagnes qui dominent le col ; elles portent le nom de Rochers-des-Lacs, à l'est, et Belle-Combe, à l'ouest. Les bornes, au nombre de trois de chaque côté du chemin, sont placées comme l'indique le croquis ci-annexé sous le n° 4 (c).

    D'autres cols ou passages plus ou moins praticables existent entre le Duché de Savoie et le Piémont. Des bornes y seront placées partout où il sera jugé nécessaire.

Art. 2. Du côté de l'arrondissement de Nice, la frontière entre les deux états sera la suivante :

    De l'Enchastraya à la Cime de Colla-Lunga, la crête des Alpes, des bornes seront placées aux cols et passages suivant la ligne de séparation des eaux. De la cime de Colla-Lunga, la ligne de démarcation suivra la crête qui s'en détache vers le sud, ainsi que le petit vallon qui se trouve dans cette même direction, jusqu'à la rencontre avec le chemin de Saint-Etienne à Colla-Lunga (borne).

    De là, elle ira en ligne droite à la pointe occidentale de Lous Cloutas (borne), puis à Sierrera del Camp (borne), en traversant la gorge du Cloutas en ligne droite. De la borne de Sierra del Camp, elle suivra la ligne de partage des eaux et passant par le Serre del Terrassier, les rochers du Crest qui le terminent, près de la maison dite Lou Stalet qui reste du côté de la France et sur le Coulet, où une borne sera placée, elle ira aboutir au confluent de la Guercia et du Castiglione.

    Entre la borne del Camp et l'origine du Serre del Terrassier, il sera placé deux bornes ; comme l'indique le dessin ci-joint (annexe n° 5).

    Au confluent de la Guercia et du Castiglione, sont deux gros rochers sur lesquels sera marquée la ligne frontière. De ces rochers, elle remontera par la crête abrupte de Serre de Vial jusqu'au petit col (borne), compris entre Testa de Ballarout et cime de Cialance, rejoindra cette dernière cime et descendra jusqu'à la Tinéa par le torrent nommé Pusé vers sa source, et vallon de Buona Nueuce à deux cent cinquante mètres au-dessous du vallon de Molières, le thalweg de la Tinéa sera la ligne de démarcation.

    Là, d'énormes rochers couronnés par le plateau de Beaucier dominent la rive gauche de la Tinéa, une marque tracée sur ces rochers, puis la pointe de Cairiglios qui s'élève au nord du plateau susmentionné, fixeront la ligne de démarcation qui traversera ainsi les rochers de Manval.

    De la pointe de Cairiglios, la ligne suivra d'abord les rochers qui bordent le plateau au nord, et prendra ensuite la direction de la crête qui descent du point le plus élevé de Malaneut (borne). Cette crête porte les noms de Serriera del Pel, Serre del Pel, la Tira, et Riba de las Planas ; elle passe à la cabane du Cluot de Ciay, à la borne de Ciay, et entre les deux maisons de Maissiat. De Malaneut à la Penna Blanca, la ligne de démarcation traversera le vallon de Los Clapetos en ligne droite ; de là, en suivant la crête, elle passera à la Rocca Rougia, et joindra le confluent des deux sources du Mijes ; elle suivra ce ruisseau, qui prend le nom de Cabana Vieglia, jusqu'à son confluent avec le vallon de Gasc, remontera ce dernier vallon puis celui de Costa Baudina, et atteindra ainsi la pointe de la Raya, d'où elle ira, en ligne droite, à la cime du Baus de la Fréma. Du Baus de la Fréma, la limite des deux états suivra la crête qui descend au col de la Balma de la Fréma (borne) ; de ce col, tournant vers le nord-est, elle arrivera en ligne droite à la naissance du vallon des Amberts, et suivra ce vallon jusqu'à sa rencontre avec la limite des communes de Val di Blora et Saint-Martin-Lantosca (borne). Elle se confondra avec cette limite jusqu'au Balaur Soubran (borne), en passant par le Balaur Soutan. De là, elle rejoindra en ligne droite l'origine du vallon d'Arcias, et le descendra jusqu'à son confluent avec le val de Borreone. Depuis le confluent du vallon d'Arcias jusqu'à trente mètres en amont de celui de Valliera del Saut, le thalweg du Borreone sera la ligne de démarcation. A la hauteur de ce point et sur la rive gauche du vallon, se trouvent de grandes masses de rochers, la ligne frontière les traversera en ligne droite pour atteindre la cime inférieure de Piagu (borne).

    De la cime de Piagu à la crête qui règne entre le vallon de Madonna dit Finestre et le vallon de Gordolasca, la ligne de démarcation suivra le vallon de Madame (une borne sera placée à l'intersection de ce vallon avec le chemin qui conduit au col de Finestre), descendra celui de Finestre et, après cent vingt mètres de parcours, remontera le vallon del Mare Soutan pour aller aboutir aux rochers (borne) qui se trouvent sur cette crête entre la Testa del Mare à l'ouest, et celle du Cimietri à l'est. La ligne frontière suivra alors la crête en passant par la cime de Fuon-Freja, Mont Clapeiretta, Mont Lapassé, Testa del Cinant, Cima del Pettu di Prals, et arrivera à la cime de la Valletta où une borne sera placée. De là elle ira en ligne droite à l'origine du vallon de la Valletta, qu'elle suivra jusqu'à sa rencontre avec le Gordolasca, remontera ce vallon jusqu'à cent cinquante mètres au-dessous du pont de la Cabana (borne), prendra le vallon de la Testouletta et atteindra ainsi la cime de Calfach, puis, en suivant la crête, le Cappelletto, et enfin la Cima del Diavolo.

    De la Cima del Diavolo se détache un contre fort qui forme au sud le bassin de la Miniera. Sa ligne de démarcation en suivra la crête qui forme déjà la limite entre les communes de Tenda et Saorgio et dont les points remarquables sont : Cima di Macruera, Cima del lac Carbone, Lo Scandaï, Pointe dell' Arme del Bocco, Pointe del Violé, Cima del Vespé, Cima della Nauca et Monte Gaurone. Du signal géodésique de Monte Gaurone, la ligne frontière continuera à suivre la limite entre les communes susindiquées qui, passant par les rochers dei Corvi, va, de la pointe méridionale de ces rochers, rejoindre en ligne droite l'origine du vallon de Paganin en traversant les rochers de Balma Garbata. De là, elle descend ce dernier vallon jusqu'à la Roya (borne), remonte cette rivière jusqu'au confluent du vallon de Groa qu'elle suit jusqu'à sa source et se confond ensuite jusqu'à la pointe dite Commune (borne), avec les limites de Briga et de Saorgio, qui passent par Bassa de Giasque, le vallon de Bendola, vallon de la Borega, Cima de Pegairole, etc. De la pointe commune, la ligne de démarcation ira à la pointe Arpetta. De l'Arpetta, elle descendra par le vallon de Crauzel dans celui de Carvala qu'elle suivra jusqu'au vallon de Ciapela Valgrana, remontera ce dernier vallon, passera à la croix de Meiriza (borne), atteindra en ligne droite la tête du vallon dell' Amore et suivra ce ruisseau jusqu'à sa rencontre avec la limite qui sépare les communes de Breglio et de Penna (borne). De là, sauf au sud de la Cima del Bosco entre les points A et B marqués sur le dessin (annexe n° 6), où elle sera tracée suivant la crête qui forme à l'ouest le bassin de la Bassera ; elle suivra la limite entre les arrondissements de Nice et de San-Remo qui passe par les hauteurs de Damasco, coupe la Roya, suit le vallon du Rio, la crête qui descend du col de Brouis par Testa di Paola et Mont-Grazian, traverse la Bevera, passe par Testa di Cuore, la Serrea, les rochers de Montacier, le Grammondo, les rochers de Campassi, Testa dell' Ausura, les rochers de Corna, la roche Longheira et Castello del Lupo, elle continuera de suivre cette limite environ deux cents mètres vers le sud jusqu'à la pointe (borne) qui se trouve entre Castello del Lupo et le Monte Carpano. De là, passant par ce dernier mont, la Guardieura et la cime della Giranda, elle descendra par les rochers de ce nom et ira aboutir à l'entrée du pont de Saint-Louis qui reste au Piémont (borne). Du pont à la mer, le thalweg du ruisseau de Saint-Louis formera la ligne frontière.

Art. 3. Il est entendu que la fixation de la limite de souveraineté ne portera aucune atteinte aux droits de propriété et d'usage, non plus qu'aux servitudes actives et passives des particuliers, des communes et des établissements publics des pays respectifs.

    Les Français propriétaires, à la date du Traité d'annexion de la Savoie et du Comté de Nice à la France, de terres situées en Piémont dans le demi-myriamètre de la nouvelle frontière, et les Piémontais propriétaires, à la même date et dans les mêmes limites, de terres situées en France, jouiront de la liberté d'importer en France et dans les Etats sardes, sans avoir à acquitter aucun droit de douane ni à la sortie, ni à l'entrée, soit du Piémont, soit de France, les denrées provenant de la récolte de ces terres, ainsi que les coupes de bois, le lait, le beurre, les fromages et la laine ayant la même origine.

    Dans les limites qui viennent d'être indiquées les Français propriétaires dans les Etats sardes, et les Piémontais propriétaires en France seront admis à transporter en franchise, d'un pays dans l'autre, les engrais destinés à l'amendement de leurs terres et les grains nécessaires aux semences.

Art. 4. Les produits ci-dessus mentionnés provenant, dans le Comté de Nice, des territoires piémontais compris entre la frontière et la crête des Alpes et appartenant, soit à des populations françaises, soit aux hameaux de Molières, de la Lionne et de la Guercia, soit aux deux communes de Tenda et Briga, entreront en France librement, sans avoir à acquitter aucun droit de douane.

Art. 5. Les communes françaises dont les territoires s'étendent au delà de la crête des Alpes jouiront, pour l'exploitation de la partie de leurs biens situés en arrière de cette crête, de toutes les immunités mentionnées dans les articles 3 et 4.

Art. 6. Entre Colla-Lunga et le Mont-Clapier, les douanes piémontaises ne dépasseront pas la crête des Alpes, et, dans les parages du Mont-Cenis, elles ne s'avanceront pas au delà des anciennes limites des communes de Lans-le-Bourg et de Bramant.

    Il est entendu que leur action ne pourra s'exercer, dans aucun cas, en avant de ces lignes ainsi fixées.

Art. 7. Les délits et contraventions, qui pourraient avoir lieu sur le Mont-Cenis et sur les territoires compris entre la ligne frontière et la crête des Alpes, depuis Colla-Lunga jusqu'au Mont-Clapier, seront constatés par les gardes champêtres des communes françaises aux quelles ces territoires appartiennent.

    Ces gardes champêtres devront être assermentés devant un tribunal sarde, et leurs procès-verbaux seront mis en poursuite devant ce même tribunal.

Art. 8. Les bois appartenant à des communes françaises et situés dans le Comté de Nice, entre la ligne frontière et la crête des Alpes, seront administrés par les agents du gouvernement français ; toutefois, ces agents ne seront appelés qu'à constater les délits ou contraventions en matière forestière qui seraient commis par des français résidant en France, et leurs procès-verbaux ne pourront être mis en poursuite que devant les tribunaux français.

Art. 9. Les propriétaires français ou piémontais qui voudront profiter des immunités sus-indiquées seront tenus de déclarer aux bureaux des douanes françaises et sardes les plus voisins, l'étendue, la valeur, le genre de culture des terres et le nombre de têtes de bétail dont ils auront à importer ou à exporter les produits. Ils devront, en outre, justifier de leur possession par le dépôt, dans les mêmes bureaux de douane, soit de titres de propriété, soit de copies authentiques de ces titres, soit enfin de certificats de notoriété délivrés par les maires ou de certificats des conservateurs des hypothèques.

    Chaque année, des déclarations seront faites dans la saison des récoltes pour indiquer, au moins approximativement, les quantités de produits qu'on devra importer.

    Dans le cas où les déclarations seraient reconnues par les douanes françaises ou sardes être exagérées, on aura recours à une commission d'agriculteurs, au nombre de trois, dont l'un sera nommé en France par le sous-préfet de l'arrondissement, le second en Sardaigne par l'intendant.

    Le troisième expert sera désigné par les deux premiers, et à défaut d'entente de ceux-ci, par le maire sur le territoire duquel la contestation se sera produite. Leurs avis fera régle, au moins provisoirement, sauf aux deux Gouvernements à s'entendre, s'il y avait lieu, pour le faire réformer.

Art. 10. Les délais pour l'exportation et l'importation en franchise des produits énoncés en l'article 3, provenant de propriétés limitrophes, sont fixés ainsi qu'il suit :

    Pour les bois, le lait, le beurre, les fromages la laine et les engrais, durant toute l'année ;

    Pour les produits de vendange (le moût encore muet et le vin en fermentation) à partir de la récolte jusqu'à la fin de novembre ;

    Pour les olives fraîches, les oranges, les fleurs et feuilles d'oranger, à partir de la récolte jusqu'au 1er juillet de l'année suivante ;

    Pour tous les autres produits de la terre, dits produits naturels, depuis la récolte jusqu'au mois d'avril de l'année suivante.

Art. 11. Pour être admis au bénéfice de la franchise à l'entrée, les produits, autres que que le beurre et les fromages, devront être présentés dans l'état même où l'agriculture est dans l'usage de les enlever du lieu de l'exploitation. Les bois notamment, devront être bruts, et les céréales ne devront avoir été ni battues ni engrangées.

    Toutefois, dans les localités où les transports ont lieu à dos de bêtes, les céréales pourront être importées en grains, et il est entendu que les pays mentionnés à l'article 4 de la présente Convention sont dans ce cas.

    Les importations en franchise ne pourront s'effectuer que par les bureaux où les déclarations et les titres de propriété auront été déposés.

    Chaque envoi devra, en outre, être accompagné d'une déclaration expresse du propriétaire, portant que la quantité de . . . provient réellement des terres qu'il possède dans les conditions de la présente Convention et qu'il affirme ne les avoir pas encore vendues.

Art. 12. Les fermiers, soit Français, soit Piémontais, jouiront respectivement, au même titre et sous les mêmes conditions que le propriétaire lui-même, des priviléges afférents aux propriétés limitrophes.

Art. 13. Dans les conditions prévues par la présente Convention, la faculté d'exportation en franchise sera acquise, à la sortie de France, à tous les Piémontais propriétaires en France, de terres limitrophes, et, à la sortie du Piémont, à tous les Français propriétaires en Piémont, de terres limitrophes, pourvu que leur propriété soit justifiée, et sans qu'on ait à examiner comment la propriété leur est échue.

    Mais, en ce qui concerne la faculté d'importation en franchise, les priviléges attribués, de chaque côté aux propriétaires en possession, au moment de l'annexion de la Savoie et du Comté de Nice à la France, ne seront pas transmissibles à leurs héritiers qu'autant que ces héritiers seront, suivant le cas, Français ou Sardes, et seulement aussi lorsque les biens-fonds leur échoiront personnellement, soit en ligne directe, soit en ligne collatérale au premier degré, en vertu des lois sur les successions, et seulement jusqu'à concurence de leur part individuelle. Les héritiers seront tenus de faire les justifications nécessaires.

    Les susdits priviléges s'étendent aussi aux usufruitiers, lorsque la propriété reste aux héritiers en ligne directe, et aux héritiers en ligne collatérale au premier degré.

    Les droits au bénéfice du régime des propriétés limitrophes, à l'importation, s'éteignent quand il y a succesion en ligne collatérale au dela du premier degré, transmission à titre de donation ou de legs ou par vente, et mutation de propriété à titre volontaire.

Art. 14. Les restrictions mentionnées aux paragraphes 2, 3 et 4 de l'article précédent ne sont pas applicables aux propriétés du Mont-Cenis, tant qu'elles appartiendront à des Français, ni aux propriétés comprise entre la crête des Alpes et la ligne frontière.

    Toutefois, les propriétaires des immeubles placés dans ces conditions demeureront assujettis aux obligations déterminées par l'article 9 de la présente Convention.

Art. 15. Les Français qui ont des troupeaux en France, près de la nouvelle frontière, et les Piémontais qui ont des troupeaux dans les Etats sardes, près de la susdite frontière, pourront envoyer librement ces troupeaux aux pacages qu'ils possèdent à l'étranger, et à ceux de l'étranger, à charge seulement de souscrire, au moyen d'acquits à caution levés aux bureaux de douane français et sardes, l'engagement de les réintroduire ou de les réexporter, suivant qu'il y aura lieu, dans un délai de six mois.

    Les jeunes bêtes nées à l'étranger, pendant le pacage, jouiront de la franchise à la sortie et à l'entrée. Dans le cas prévu par le présent article, le crédit pour l'exportation ou l'importation des fourrages devra, en outre, être réduit dans la proportion des quantités consommées par les troupeaux qui auront été envoyés aux pacages d'un pays à l'autre.

Art. 16. A cet acte sont annexés :

    Sous le n° 1. - Le protocole signé à Paris, le 27 juin 1860, par le général de brigade marquis de Beaufort d'Hautpoul, commissaire frnçais, et par le major général comte Petitti et le lieutenant-colonel Federici, commissaires sardes.

    Sous le n° 2. - Deux protocoles signés, l'un à Nice, le 26 novembre 1860, et l'autre à Turin, le 16 février 1861, par le lieutenant-colonel d'état-major Galinier et le chef d'escadron d'état-major Smet, commissaire français, et par le lieutenant-colonel d'état-major Federici et le capitaine d'état-major Ricci, commissaires sardes.

    Sous le n° 3. - La carte au cinquante-millième de la frontière de la Savoie, depuis le Mont-Grapillon, du côté de la Suisse, jusqu'au Mont-Tabor, où la limite de la Savoie rejoint la frontière de la France.

    Sous le n° 4. - Trois croquis au dix-millième des cols du petit Saint-Bernard et des deux Mont-Cenis qui seront remplacés par des plans réguliers à la même échelle.

    Sous le n° 5. - La carte au cinquante-millième depuis l'Enchastraye jusqu'à la cime de Colla-Lunga.

    Sous le n° 6. - Les plans au dix-millième depuis la cime de Colla-Lunga jusqu'à la mer.

    Sous le n° 7. - Le dessin figuratif des poteaux.

    Les documents mentionnés sous les n° 3, 4, 5, 6 et 7, sont contre-signés par les commissaires français et sardes.

Art. 17. La présente Convention sera ratifiée par Sa Majesté l'Empereur des Français et par Sa Majesté le Roi de Sardaigne, et les ratifications en seront échangées à Turin dans le délai d'un mois, ou plus tôt, si faire ce peut.

    En foi de quoi, les plénipotentiaires l'ont signée et y ont apposé le sceau de leurs armes."

    Fait en double original à Turin, le 7 mars 1861.

    (L.S.) Signé C. H. de Rayneval.

    (L.S.) Signé Carutti.